Anne-Catherine Lahaye La communication en situation réelle
Les étudiants découvrent que la communication est quelque chose de compliqué et la majorité ne s’y attend pas. Ils en prennent surtout conscience au niveau de la communication interne, qui est la plus problématique dans ses aspects interpersonnels. Bien communiquer c’est aussi savoir écouter !
Je m’appelle Anne-Catherine Lahaye, je travaille à l’UNamur depuis 10 ans maintenant, sous le statut de collaboratrice didactique. Je suis arrivée à l’université pour accompagner les stages des étudiants de BAC 3 Information & Communication, et puis progressivement j’ai pris d’autres responsabilités comme l’atelier d’écriture communicationnelle, l’encadrement des Travaux Pratiques du cours de sémiotique et récemment le cours de communication en entreprise. J’exerce aujourd’hui dans le secteur de la communication par l’intermédiaire de mon entreprise Oselacom.
Le cours de communication d’entreprise et le cours de sémiotique son articulés autour d’un projet intégré pour une partie des étudiants, depuis plusieurs années déjà. Pour ces deux cours nous avons une approche qui consiste à répondre à la demande d’un commanditaire réel. En d’autres mots, nous travaillons avec un client qui nous donne une mission de communication assez générale, ça peut être de communication externe ou interne. Les deux approches sont complémentaires. Dans le cadre de la communication d’entreprise il s’agit d’un seul projet commun à tous les étudiants, ils doivent donc vraiment travailler la collaboration. En sémiotique, les étudiants sont mis en sous-groupes, et les sous-groupes se positionnent comme des agences de communication concurrentes. Il y a donc plusieurs dispositifs de communication qui sont présentés au client. A l’issue du jury de mise en situation, le client décide de retenir une « agence » pour poursuivre la collaboration.
Faire vivre une expérience de communication en situation réelle aux étudiants est un challenge passionnant. Ils y trouvent du sens et se sentent valorisés car il ne s’agisse pas d’un travail en laboratoire ou en chambre, mais d’un travail pour un client qui en a besoin ! Pour ce qui est de la communication entre les étudiants et le client, il s’agit bien d’un contact direct. Je demande juste aux étudiants de me mettre en copie dans leurs e-mails, pour que je puisse réguler, si nécessaire. Il n’y a pas de filtre à priori, juste à posteriori. Si je pense qu’il y a eu des questions mal formulées ou non pertinentes je reviens vers les étudiants. Il s’agit aussi qu’ils puissent apprendre en autonomie et éventuellement de leurs erreurs.
De manière générale et caricaturale, les étudiants découvrent que la communication est quelque chose de compliqué et la majorité ne s’y attend pas. Ils en prennent surtout conscience au niveau de la communication interne, qui est la plus problématique dans ses aspects interpersonnels. Bien communiquer c’est aussi savoir écouter !
Le briefing initial constitue le kick-off où le commanditaire présente sa demande. Ensuite s’ensuivent des séances de cours théoriques et des séances pratiques pendant lesquelles les étudiants répondent à la demande du client à travers diverses productions (audit de communication, plan de communication…). Puis il y a un jury intermédiaire où le commanditaire vient à son tour écouter les étudiants. A cette occasion, ils reformulent la demande pour s’assurer que les pistes proposées sont validées. Au cours de la séance de jury final, mi-décembre, les étudiants présentent toutes les recommandations qui ont émergé de leur travail en réponse au questionnement du client. Ensuite, j’assure la liaison entre le cours de communication d’entreprise et le cours de sémiotique. Ce dernier démarre en février, c’est donc la seconde étape du projet. Nous nous revoyons avec le commanditaire pour déterminer le dispositif précis de communication sur lequel il nous missionne. Cela peut être une home page, une newsletter, une carte postale… Généralement, le briefing s’inscrit dans la continuité des productions issues du cours de communication d’entreprise. Le cours de sémiotique donne l’occasion aux étudiants, à travers la demande affinée du client, d’appréhender et mettre en œuvre les concepts théoriques tout en portant un regard critique sur les productions de communication. Le déroulé pédagogique suit un schéma similaire, c’est-à-dire, une présentation de la demande par le client, puis le jury final où les étudiants présentent les dispositifs de communication qu’ils ont mis au point.
Au niveau des compétences développées par les étudiants, il y en a toute une série liée aux outils (Google drive, et autres plateformes...) mais aussi aux soft-skills. Ils apprennent concrètement le travail collaboratif, synchrone et asynchrone, ce qui est loin d’être évident, même dans le milieu professionnel. Une occasion pour eux de s’en rendre compte.
L’intérêt de mon profil au sein de l’université c’est de faire le pont entre le monde académique et le monde de l’entreprise, la pédagogie expérientielle trouve alors tout son sens. Lorsque les étudiants sont vraiment impliqués dans la tâche, les situations qu’ils vivent sont similaires à celles vécues en entreprise. Souvent je suis amenée à les accompagner pour qu’ils puissent gérer des tensions au sein de leurs groupes, qui au départ, peuvent apparaître comme des banalités. J’essaie de les outiller à la gestion de ces conflits afin qu’ils puissent dans le futur, mettre en place eux-mêmes des stratégies pour les résoudre. Ce point est en vérité tellement important qu’une des questions lors de l’évaluation du cours de Communication d’entreprise consiste à partager leurs réussites et leurs difficultés dans ce processus de collaboration. A mes yeux, la réflexivité est une des compétences clé dans ce processus d’apprentissage.
Tout le département se mobilise pour proposer une formation intégrée à nos étudiants, nous pouvons compter aussi sur des entrepreneurs pour partager leurs problématiques, offrir des stages et participer au jury. Je souligne d’ailleurs le soutien des profs de langues pour coacher les étudiants en vue du jury de sorte que leur performance en langues soit au top. D’ailleurs, les étudiants en ressortent souvent fiers ! Ce n’est pas donné à tout le monde de monter sur scène et faire une présentation en trois langues ! Les compétences requises sont on ne peut plus réelles.