Mélanie Latiers L'accompagnement au changement et la dynamique de groupe à l'UNamur

Mélanie Latiers est passionnée par le management humain et enseigne les cours de « Gestion des organisations et du changements » en master en sciences de gestion ainsi que le « Management stratégique de projet » en master d’architecture transmédia. Au sein de ses cours, les étudiants découvrent l’accompagnement du changement et la dynamique de groupe où ils vont grâce à des jeux de rôle, travailler la connaissance de soi, les compétences émotionnelles ainsi que les types de personnalités.

Je donne des cours dans le domaine de l’entrepreneuriat et de la gestion d’entreprise avec une attention spéciale pour ce qui touche au management humain. J’entends par là tout ce qui tourne autour de la gestion de groupe, la gestion d'équipe, l'accompagnement du changement, et même l'analyse des organisations.

Au fur et à mesure des années, je me suis rendu compte que c’est assez complexe de parler d'accompagnement du changement et de dynamique d'équipe sans travailler une meilleure connaissance de soi. Si on veut accompagner un changement, il faut savoir quel est notre rapport au changement. Parallèlement, si on veut travailler dans une équipe, il faut savoir quelles sont nos forces et nos faiblesses. En matière d’enseignement, expliquer ce que c’est de vivre un changement, ça ne suffit pas. Les résultats sont bien meilleurs lorsque les étudiants sont plongés dans cette situation.

D’un point de vue pédagogique, cette prise de conscience s’est traduite principalement par deux choix. D'abord, une voie plus ludique dans le cadre de l'accompagnement au changement avec un Game designer dans le cours de gestion du changement. C’est-à-dire un jeu de rôle où les étudiants doivent prendre un rôle au sein d'une cellule qui vit un changement pour ensuite travailler sur ce qu’ils ont vécu et leur ressenti. Au travers de situations simulées ou d’expériences vécues on travaille les compétences émotionnelles : comment ils identifient leurs émotions, comment ils les expriment, comment ils les comprennent.

Le deuxième axe, explore la dynamique de groupe avec les étudiants de master en architecture transmédia (codiplôme avec la Haute École Albert Jacquard), où les étudiants travaillent sur un projet transmédia tel qu’un site internet, un film d'animation, un livre et qui tourne autour d'une thématique commune.

Au début, je me suis dit, je vais donner des exercices, notamment des jeux de rôle, etc. mais je n’étais pas totalement satisfaite. Ensuite l'idée m’est venue de travailler sur les types de personnalité en voyant des TP (en bio ingénieur) à Louvain-la-Neuve. Sur base d'un modèle qui s'appelle ComColors les étudiants explorent leur manière d’interagir en groupe. Grâce à un financement du programme Générations Entreprenantes, j’ai eu l’occasion de tester la méthode en faisant venir un intervenant pour former les étudiants au modèle. Ils ont passé un questionnaire de personnalité, suivi une formation afin de valider leur profil de personnalité et finalement reçu un bilan d'une vingtaine de pages qui détaille ce profile et nourrit leur réflexivité. Cette phase d’introspection permet ensuite de faire travailler les étudiants sur des actions et réflexions à mettre en place dans leurs équipes en lien avec les différents types de personnalités et le résultat est très riche.

Le succès de cette expérience m’a donné l'impulsion de me former, d’être certifiée, de pérenniser ce projet ainsi que de l’étendre à d’autres cours comme par exemple au sein du Master en pharmacie.

Les exercices en lien avec les compétences émotionnelles, c'est quelque chose de très fort qui reste subjectif et personnel. Il y a des étudiants qui sont surpris d’apprendre autant de choses sur eux-mêmes et sur la dynamique de groupe. Certains évoquent le fait que ça leur sera très utile pour le futur ou que le cours a eu un effet révélateur, par rapport à eux-mêmes mais aussi aux autres.

Par la suite, j'ai des étudiants qui me recontactent, en disant, on a un problème avec notre groupe, comment nous conseillez-vous d'aborder telle personne ? C’est le moment où ils remobilisent le modèle l'année qui suit le cours et c’est gratifiant ! C’est une grande source de motivation de savoir qu’on enseigne quelque chose à quelqu'un et qu’il l'utilise.

Quand on pense aux différentes compétences que les étudiants développent dans mes cours ont peut parler d’apprendre à travailler avec les autres que ce soit en équipes ou plus largement dès qu’il y a des relations interpersonnelles. Ils apprennent également à développer la conscience de soi, c’est-à-dire ce qui les mobilise ou au contraire les freine. Enfin, je dirais la motivation aussi, parce que dans ComColors, il y a toute une partie centrée sur la motivation : aller la chercher là où elle se cache et la nourrir.

Il y a une réflexion qui m'est venu récemment, c'est qu’il ne faut pas négliger la maîtrise de la matière avant de passer à ce genre de méthode. Je me rends compte que ce n’est peut-être pas quelque chose qu'on doit faire la première année où on donne un cours. Pour passer à un niveau plus participatif où on doit un peu lâcher prise sur le contenu, sur ce qui va se passer, je pense qu'il faut pouvoir jongler avec la matière et connaitre son public.

L’un ne va pas sans l'autre, ce n’est pas le contenu d'un côté, l'émergence de l'autre. Pour faire les liens et rebondir sur ce qui est dit afin de construire le cours dans l’interaction, il faut avoir une vue d’ensemble des contenus et être flexible sur la manière de les aborder.

En tant qu’enseignante, cela m'apporte énormément de nouvelles connaissances et un lien particulier avec les étudiants. Je dirais en plus une conviction que ce n’est pas moi qui dois amener tout le contenu, en tout cas dans ma matière, car elle peut aussi se construire au travers des apports des uns et des autres.

Je fais beaucoup d’exercices où ce sont les étudiants qui donnent les réponses à un modèle. Je crois dans l'intelligence collective, et au fait qu’on peut faire confiance au groupe, c'est une première chose. Personnellement, j’apprends beaucoup : le modèle ComColors, la question des compétences émotionnelles et surtout la richesse du collectif.

Il ne faut pas faire les choses seul. Je n'ai pas fait ce chemin toute seule, c'est à chaque fois via des rencontres et un réseau que tout s'est construit.

C'est un autre apprentissage, on ne peut pas avoir toutes les compétences, il faut faire appel à l'extérieur pour ensuite construire ensemble et rebondir sur les idées des uns et des autres.